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jeudi 24 février 2022

QUELQUES INTERROGATIONS URGENTES À SE SOUMETTRE

DU CONTEXTE


Au Burkina Faso et en Afrique occidentale on assiste à une résurgence des coups d'État paradoxalement "acceptés".

Dès lors,on est en droit de s'interroger sur la politique de gouvernance adéquate en Afrique surtout entre les systèmes révolutionnaire et démocratique.

✍️: Issouf SAGNON


DÉMOCRATIE LÉGALE OU RÉVOLUTION LÉGITIME?

En Afrique malgré l'avènement des régimes démocratiques depuis les années 1990, force est de constater que le continent peine à se hisser au niveau des puissances émergentes. La faute,en grande partie ,aux querelles liées à la qualité de la gouvernance politique le plus souvent.

En Afrique occidentale les défis du moment ont même conduit au retour des prises de pouvoir par les armes. Curieusement ces coup d'État semblent être bien accueillis du fait des difficultés à trouver des réponses adéquates aux défis économiques et sécuritaires de la part des régimes déchus.

Le paradoxe est encore plus grand lorsque des acteurs censés défendre les principes démocratiques tendent à justifier les coups de force pour le pouvoir politique, dans le même sens que des populations qui en trouvent un motif d'espoir . De quoi faire avancer l'argument de la légitimité au-dessus de celui de la légalité. 

Faisant le rapport avec le bilan de l'avènement de la démocratie,on est tenté de se demander s'il faut continuer à opter pour des régimes démocratiques, étant donné que la plupart des pouvoirs issus de ces régimes n'ont pas réussi à porter les pays respectifs au rang des puissances émergentes depuis les indépendances jusqu'à nos jours.

Il faut cependant pousser la réflexion plus loin afin de relever quelques nouvelles questions :

Est-ce la faute aux principes démocratiques ?

Ou la faute des hommes politiques qui en font mauvais usage ?

 Si dans un pays donné il est reconnu que les difficultés sont liées aux principes démocratiques,il faudra y alors repenser la démocratie ,la réadapter au contexte socio-culturel dudit pays.Il faudra certainement s'attendre à d'énormes difficultés d'application eu égard aux réalités sociales (notamment sur ,l'ethnie la religion,la culture) qui ont un poids lourd sur l'organisation des systèmes de dévolution et de gestion du pouvoir politique, hormis un cadre légal rigoureux.

Si l'on s'accorde aussi que la faute n'est pas imputable aux principes démocratiques mais plutôt aux hommes politiques qui en font un usage déplacé ou qui n'en utilisent pas,il faudra alors renforcer nos systèmes démocratiques, rendre vivace et sein le débat public politique afin d'aboutir à une grande et meilleure participation des populations au jeu électoral. 


En tout état de cause,il faudra se résoudre à faire un choix de gouvernance. Au regard des deux grandes tendances "RÉVOLUTION LÉGITIME" et "DÉMOCRATIE LÉGALE" qui se dessinent,la meilleure option semble être le recadrage des acteurs du jeu électoral que sont essentiellement les partis politiques autour de ces deux blocs idéologiques. Ceci aura le mérite de guider l'engagement et le militantisme vers des bases idéologiques auxquelles les acteurs pourront y joindre des programmes et de nouvelles convictions.


vendredi 11 février 2022

ACTUALITÉ JURIDIQUE AU BURKINA FASO, QUELLE LECTURE ?

Ces dernières années l'actualité juridique au Burkina Faso a été beaucoup mouvementée. En effet depuis plus d'une dizaine d'années des réformes et des tentatives de réformes ont été initiées ou menées par les autorités politiques diverses. Le constat est que cela traduit une instabilité juridique qui n'est pas sans conséquence sur la stabilité politique du pays.





UNE INSTABILITÉ JURIDIQUE, CAUSE DE L'INSTABILITÉ POLITIQUE ! 


Depuis les années 2011-2012 le pays a connu fréquemment une actualité houleuse sur les plans juridique et legal. La tentative de réforme majeure demeure celle au sujet de l'article 37 de la constitution de l'époque et de l'institutionnalisation du Sénat. On se rappelle que la volonté d'opérer ces réformes avait nécessité la mise en place d'un cadre de concertation pour les réformes politiques (CCRP). Chose qui a longtemps animée la classe politique jusqu'à un aboutissement inattendu en 2014 avec la chute du régime Compaoré. 

Sous la transition politique de 2015 des réformes ont été opérées également. Le milieu juridique a été mouvementé par la même occasion. Là également on se souvient qu'au départ de la transition des forces vives ont dû adopté une charte de la transition après l'appel du Conseil Constitutionnel et on a assisté à la suspension de la constitution. En outre la fameuse loi "Shérif" a été adoptée, entre autres,et consacrait l'exclusion de certains candidats issus de l'ex majorité,en guise de sanction politique pour leur part de responsabilité dans les évènements ayant conduit à l'insurrection populaire des 30 et 31 Octobre 2014. 

Le nouveau régime issu des élections du 29 Novembre 2015 a à son tour adopté des réformes et marqué l'actualité juridique qui cependant était éclipsée par la situation sécuritaire du pays. De la révision du code pénal à l'adoption de la loi portant création des volontaires pour la défense de la patrie (VDP) en passant par la relecture de la constitution et du code électoral,on a assisté à de nombreuses réformes qui cependant, ne se sont pas toujours inscrites dans la durée et n'ont pas toujours été à l'origine d'institutions fortes.

Ce manque de "solidité" dans la durée de certaines réformes a été la cause de crises politiques fréquentes et donc d'une instabilité politique parce que les institutions républicaines demeurent moins fortes. Par conséquent la mission des praticiens du Droit et des exécutants des textes s'avère délicate.D'autant plus que de nouveaux éléments entrent en jeu, notamment les aspects de légitimité et de rapport de force.


L'IMPACT DE LA LÉGITIMITÉ ET DU RAPPORT DE FORCE SUR LE DROIT ET LA LÉGALITÉ.


La remarque que nous avons pu faire est que la notion de légitimité interfère fréquemment dans l'interprétation et l'exécution des normes au Burkina Faso ces dernières années. La fragilité des institutions liée à la non solidité du système normatif facilitent cet état des choses. En rappel cette notion de légitimité avait fortement encourager, à juste titre une grande partie de la population qui s'était insurgée contre la modification de l'article 37 de la constitution en 2014.

Par la suite plusieurs décisions et textes ont été votés selon le rapport de force au profit des principaux acteurs du moment. Ce fut le cas de la dissolution du Régiment de Sécurité Présidentiel (RSP),le cas de la validation de la loi "Shérif" malgré la réserve émise par la cour de justice de la CEDEAO,etc.

Il est alors certains que notre système normatif et nos institutions sont loin de la force nécessaire pour garantir une stabilité politique durable. En plus de cette instabilité le défit sécuritaire depuis 2016 a rendu difficile la gouvernance politique. Ce qui a largement contribué à l'avènement du MPSR au pouvoir par Coup d'État du 24 janvier 2022.

L'on constate encore une actualité juridique bouillante. En effet les principales institutions républicaines ayant été dissoutes par les acteurs du coup d'État,il fallait camoufler au sujet d'une base juridique sur laquelle fonder le nouveau pouvoir. D'où la création par le MPSR de l'Acte Fondamental contenant des dispositions à travers des Titres et des articles.

L'aspect rapport de force entrant en jeu, l'Acte Fondamental semble se superposer à la constitution et la rend implicitement subordonnée à l'acte fondamental en cas de contradiction. L'article 36 de l'acte fondamental stipule qu'"avant l'adoption d'une charte de transition,les dispositions du présent Acte fondamental fondent le pouvoir du Mouvement Patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration."

Le même article précise dans son alinéa 2 que" dès sa signature, l'Acte Fondamental lève la suspension de la constitution du 2 Juin 1991 qui s'applique à l'exception des ses dispositions incompatibles avec le présent Acte."

 On perçoit clairement une situation qui affecte la supériorité de la constitution censée être au sommet de la hiérarchie des normes.On se pose alors la question de savoir s'il était nécessaire de lever la suspension de la constitution vu qu'elle ne pourra pas s'appliquer pleinement dans toutes ses dispositions.

L'impact des aspects de légitimité et de rapport de force est d'autant plus grand qu'il affecte par moment l'attitude des acteurs de la société en fonction de la conjoncture sociale. Par exemple le coup d'État du 24 janvier semble être bien accueilli par bon nombre de personnes,pas au nom de la légalité en tout cas!

Comme mentionné plus haut ces facteurs ne facilitent pas non plus la tâche des praticiens et des acteurs du droit et de la justice qui semblent s'adapter à la situation du moment au détriment des principes juridiques et légaux.

 En témoigne les décisions du Conseil Constitutionnel qui après avoir constater à juste titre la vacance de la Présidence du Faso par décision n° 2022-003/CC du 08 février 2022  a décidé de la dévolution des fonctions du Président du Faso au profit du L.C.P.H Damiba par décision n° 2022-004 de la même date.

Cette dernière décision sur la dévolution du pouvoir a suscité beaucoup de réactions chez les acteurs du Droit. En décidant ainsi le Conseil Constitutionnel n'a-t-il pas constitutionnalisé indirectement les coups d'État comme moyen d'accession au pouvoir ? Les sages du Conseil Constitutionnel ne pouvaient- ils pas se contenter de constater la vacance de pouvoir à la Présidence du Faso et de prendre acte de la situation actuelle en appellant à un retour rapide à l'ordre Constitutionnel? 

Une chose est certaine la conjoncture actuelle ne facilite pas les choses pour les autorités en charge de l'application du Droit. D'ailleurs au sujet des juridictions ,si l'article 33 de l'Acte Fondamental rappelle que" la justice est indépendante" dans l'alinéa 1, son alinéa 2 précise par contre que" les juridictions conservent leurs prérogatives en ce qu'elles n'ont rien de contraire au présent Acte". 

Est-ce à dire que les juridictions perdent leurs prérogatives en tout ce dont elles auront de contraire à l'acte fondamental, consacrant ainsi la suprématie de cet acte fondamental à la constitution ? En somme,au Burkina Faso le Droit et la légalité sont fortement impactés par la volonté politique des acteurs disposant d'un rapport de force favorable d'une part et d'autre part par des interprétations de la part de l'élite sur la base de la légitimité. Mais légitimité jusqu'à quand ? Puisque la pratique nous montre clairement qu'après avoir utilisé la notion de légitimité pour couvrir un pouvoir ou une situation conjoncturelle donnée,dans la gouvernance,les principaux acteurs finissent par s'éloigner des valeurs qui renvoient à cette légitimité.

Il est alors capital de réussir à se doter d'un arsenal juridique solide s'inscrivant dans la durée afin d'avoir un encrage important d'institutions fortes au Burkina Faso. Après quoi,il vaudra mieux s'attacher fortement aux principes afin d'éviter l'exploitation des différents systèmes de gestion de la société Burkinabè en fonction des rapports de force du moment.

Issouf SAGNON.

@sagnon_issouf.

Sagnon226.blogspot.com


mercredi 2 février 2022

LE CONSTAT AMER DES TROIS ÉCHECS

 Au Burkina Faso et presque partout en Afrique les évènements nous conduisent à faire un constat amer, celui d'un échec multidimensionnel. Pas dans le but de dévaloriser ou de sous-estimer les progrès déjà réalisés de part et d'autre. Mais plutôt dans l'espoir d'arriver à un lendemain meilleur dans les domaines essentiel de développement.

Nous pouvons alors déduire des difficultés de l'heure l'échec du peuple, l'échec de la classe politique et l'échec de l'élite dans son ensemble.


POURQUOI L'ÉCHEC DU PEUPLE ?


Ne dit-on pas que le pouvoir appartient au peuple ?

Ne dit ont pas que chaque peuple mérite ses dirigeants ?

Parce qu'il appartient à chaque peuple de déterminer le chemin à suivre,de déterminer qui doit diriger,de déterminer comment diriger,etc ,le tout pour le présent et pour les générations à venir.

Et pour y arriver il faudra d'abord prendre conscience que le peuple comprend toutes les personnes de toutes les composantes de la société dans son ensemble. Ensuite il faudra une synergie d'actions entre les catégories d'acteurs de la société dans la prise de conscience collective, dans la politique de la société de façon générale. Par exemple l'intellectuel est censé servir d'ambassadeur auprès du paysan illettré pour une amélioration des affaires courantes de la société. Et ce,en considération des droits et devoirs des citoyens. Cette synergie d'actions devrait être réelle entre tous les membres de la société de façon à combler les manques ça et là afin que chacun puisse contribuer activement et positivement à la construction de la société.

Malheureusement il se trouve que dans chaque catégorie,les membres du peuple ne s'occupent que de ce qui les intéressent,de façon égoïste. 

L'homme politique ne s'intéresse que de comment conquérir et conserver le pouvoir .

Le commerçant ne s'intéresse que de comment réaliser son profit dans ses affaires quotidiennes.

Le "petit bourgeois", fonctionnaire ou pas ,ne s'intéresse qu'à sa petite famille et à son compte bancaire.

Ainsi de suite, chacun semble se chercher de sorte que le facteur commun est ignoré jusqu'au jour où on se rende compte qu'il faut s'occuper de l'intérêt général sur tel ou tel plan.

 Cette démission de la majorité des acteurs dans l'engagement citoyen pour l'intérêt général laisse alors la lassitude à une minorité de s'occuper à ce qui intéresse tout le monde. Par exemple sur le plan politique cela fausse la donne dans la mesure où une minorité de la population élit le plus souvent le président qui est censé incarner les aspirations de tous ou de la grande majorité.

Il est parfois fréquent d'entendre dire que les hommes politiques manipulent et profite de l'ignorance du "bas peuple" que l'on qualifie de "mouton", justifiant ainsi l'échec de celui ci. Comme si le manque d'instruction est synonyme d'absence de valeurs ! Comme si la pauvreté est forcément synonyme d'absence de valeurs!

IL faut alors reconnaître que le peuple a échoué en Afrique et au Burkina Faso car depuis les indépendances les pays sont à la traîne. 

Le Burkina Faso y était presque après l'insurrection populaire en terme d'éveil de conscience. Mais le temps a prouvé l'inconsistance et l'incohérence du peuple dans son ensemble. Et ce , à tous les niveaux. 

Il est alors urgent que la synergie d'actions soit réelle pour une prise de conscience collective afin que chaque citoyen puisse participer activement et de façon constructive à l'édification de nos pays.


POURQUOI L'ÉCHEC DE LA CLASSE POLITIQUE ?


Parce que c'est elle qui regroupe le mieux les décideurs et les responsables dans les domaines les plus importants du développement et dans les institutions les plus importantes. Il appartient donc à la classe politique de trouver les meilleures formules pour le bien être de tous dans la société. Pour y arriver le peuple et les intérêts du peuple devraient être au centre des préoccupations au niveau des dirigeants. 

Le constat est que ce n'est pas le cas. L'objectif de la classe politique est clairement résumé à comment obtenir et conserver le pouvoir politique. D'où cet échec. Parce que les politiques et les systèmes dans les différents domaines ne sont pas adaptés aux besoins des populations mais plutôt aux besoins politiques des hommes politiques. 

Voilà pourquoi les systèmes éducatifs ne sont pas adaptés aux réalités de l'emploi car cela demandera une vision et une volonté dans le long terme au moment où les hommes politiques pensent aux prochaines élections ;

Voilà pourquoi les systèmes sécuritaires n'ont jamais été adaptés à la protection des populations au moment où ils ont été façonnés pour la protection de tel ou tel régime ;

Et j'en passe...

Là également il est urgent que les futurs dirigeants sachent qu'il est temps d'apprendre à être des leaders et des hommes d'État qui auront de façon permanente à l'esprit la satisfaction des besoins réels des populations,et donc devront avoir au centre de leurs  préoccupations la satisfaction des intérêts généraux en lieu et place des intérêts égoïstes. Ils devront apprendre à penser aux générations futures au moment où il faudra régler les problèmes de l'heure. D'où la nécessité de faire preuve d'anticipation, d'intelligence,de responsabilité, d'intégrer les valeurs et les principes légaux dans les actes de tous les jours.


POURQUOI L'ÉCHEC DE L'ÉLITE ?


Pour son incapacité à impacter positivement non seulement sur la qualité de la gouvernance mais aussi sur la qualité de l'éveil des consciences. La minorité qui arrive à  y jouer sa partition n'y arrivera jamais seule. Parce que l"élite dans son ensemble a trahi son peuple" comme le dira le Pr Laurent BADO. En effet il est fréquent de voir des intellectuels mettre leurs compétences,leur intelligence au profit d'un régime,d'une classe politique en lieu et place du profit des populations.

 Pour profiter des avantages du pouvoir des juristes ont eu à orienter des interprétations textuelles aux profits des hommes politiques et non au profit de l'intérêt général ;

Pour les mêmes raisons des économistes ont cautionné des prises de décisions sur l'économie nationale dans le sens des objectifs politiques à atteindre et non dans le sens de la satisfaction des besoins populaires.

De la même façon des leaders d'organisation de la société civile ont troqué leurs convictions et les règles de la morale avec des avantages politiques soit en manifestant activement leur soutien à telle ou telle famille politique au moment où leur rôle essentiel était d'assurer la veille, soit en adoptant une posture de silence complice sur des questions essentielles au moment où leur avis éclairé serait le bienvenu.

Et j'en passe...

Ces cas sont fréquents au Burkina Faso et ailleurs en Afrique. L'ensemble de ces échecs justifie suffisamment les difficultés existantes et l'ampleur des défis à relever. Il faut donc impérativement que l'élite également se mette au service de son peuple d'autant plus que c'est le peuple qui supporte le coût de sa formation scolaire et académique. Elle doit aussi incarner des valeurs, promouvoir l'engagement par convictions et participer franchement à l'éveil des consciences populaires.


Issouf SAGNON

L'URBANISATION AU BURKINA FASO.

  L'urbanisation désigne bien évidemment l'augmentation du nombre de villes mais aussi de la population urbaine. Au Burkina Faso que...